J’ai profité de votre
passage à ma caisse pour glisser cette lettre dans votre sac parmi vos achats.
Aujourd’hui est un grand
jour pour moi : je vous ouvre mon cœur. Il est temps car la pression
énorme qu’il subit commence à le fragiliser.
Nous nous connaissons depuis
plusieurs mois : tous les samedis vous êtes client de la supérette où je
travaille, et vous avez pris l’habitude de choisir, parmi les caisses disponibles,
la mienne. Vous me situez ?
Dès le début, vous avez
éveillé ma curiosité à votre façon de
poser les articles délicatement sur le tapis, en ordre, la barre de prix bien
visible, à votre insistance pour que je n’ai pas à porter les articles trop
lourds, à votre élégance lorsque vous me tendez votre carte de fidélité bien
avant que je vous la demande. Vous ne manifestez jamais d’impatience si un prix vient à
manquer ou si le boitier de la carte bleue tombe en panne au moment du
paiement. Vous arborez en permanence un léger sourire sur vos lèvres et dans vos
yeux, vos « bonjour », « merci », « bon courage »
sont remplis d’empathie et de chaleur.
J’avoue que très vite est né en moi un certain intérêt à votre égard et j’ai su que ces courts moments
passés en votre compagnie seraient à chaque fois un petit interlude dans ma
journée de labeur.
Avec le temps, mon sens de l’observation s’est aiguisé à
votre sujet et j’ai pu constater à l’aide de votre panier qu’il n’y avait pas
de femme dans votre vie, ni d’enfant, seulement un chien et un désir de manger
sainement. N’y voyez pas là du voyeurisme mal placé, j’apprenais juste à vous
découvrir un peu plus. S’en est suivie une prise d’indices à chacun de vos
passages sur votre physique, une invitation gourmande, dois-je avouer, à découvrir un territoire nouveau...
Les mois passant, ma
capacité à dénoter les yeux fermés votre présence s’est affinée. Il me
suffit de percevoir le timbre de votre voix, les effluves corsés de votre
parfum ou les piaillements nerveux de votre épagneul qui vous attend avec
impatience à la sortie du magasin …..Ces signaux sont comme un réveil
de tout mon être. Mon corps s'alerte, activé par une sensibilité à fleur de
peau. Tout me parait soudain plus beau, intense, vivant. Il vous est
arrivé d’effleurer ma main, sans le vouloir, et ce que je prends comme un geste
anodin chez les autres clients, nourrit en moi un désir grandissant à votre
égard lorsqu'il s'agit de vous.
Forcément, je me surprends à
compter les jours qui me rapprochent du samedi suivant et je l’attends comme on
attend un rendez-vous galant, dans l’espoir de vivre avec la même intensité cette
parenthèse délicieuse.
Et puis il y a eu ces deux
samedis de Juin où vous n'êtes pas venus. J’ai eu très peur de vous
avoir perdu, de ne plus vous revoir. Je
m’en suis voulu, alors, de mon manque d'audace, d’être restée finalement une
simple caissière à vos yeux…
Quand vous êtes réapparu, le visage hâlé, la mine reposée, témoignant d’un séjour ensoleillé, mon soulagement a été de courte durée. Rapidement, j’ai pensé que vous étiez parti très loin de moi, voir d’autres horizons, faire d’autres rencontres, plus intéressantes, plus enrichissantes, à des kilomètres de la routine de votre vie, de nos rencontres qui n’en sont pas vraiment…
Aussi, dans la crainte de revivre une autre absence, je me dois de ne plus taire ce sentiment ardent qui agite mon cœur, mes jours et mes nuits. Je sais, il n’y a peut-être aucune réciprocité dans cette attirance, sans doute n’avez vous que faire de ma personne. C'est un risque que je veux bien prendre…En vous avouant mes sentiments, je le rends réel, je l’inscris dans ce monde, car nous sommes maintenant deux à le connaître.
Quand vous êtes réapparu, le visage hâlé, la mine reposée, témoignant d’un séjour ensoleillé, mon soulagement a été de courte durée. Rapidement, j’ai pensé que vous étiez parti très loin de moi, voir d’autres horizons, faire d’autres rencontres, plus intéressantes, plus enrichissantes, à des kilomètres de la routine de votre vie, de nos rencontres qui n’en sont pas vraiment…
Aussi, dans la crainte de revivre une autre absence, je me dois de ne plus taire ce sentiment ardent qui agite mon cœur, mes jours et mes nuits. Je sais, il n’y a peut-être aucune réciprocité dans cette attirance, sans doute n’avez vous que faire de ma personne. C'est un risque que je veux bien prendre…En vous avouant mes sentiments, je le rends réel, je l’inscris dans ce monde, car nous sommes maintenant deux à le connaître.
Mon cœur s’en sentira
peut-être soulagé.
Bien à vous…
Et bien ! C'est chaud 😁😉 j'espère qu'il y aura une réponse 😋
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